Les livres

Jusqu'à l'âge de quatre ans, il n'y avait pas de livres à la maison, vu qu'il n'y avait pas de place dans notre cabane au fond d'un jardin, qui devait faire 15 mètres carrés, juste une chambre, la place du lit de mes parents et de mon petit lit en fer, et une cuisine, une petite table, trois chaises, un mini-buffet, un évier..
Donc pas de place pour le superflu!
Quand nous avons déménagé pour un appartement gigantesque, mes parents ont acheté des meubles, les plus grands qu'ils ont trouvés, et mon père a acheté des livres, mais pas un livre par un livre, à chaque fois les oeuvres complètes... Et il a commencé par Balzac!

Et tout de suite, ces objets magiques, qui sentaient bon le cuir, et dont les pages en papier bible, d'une incroyable finesse, couvertes de petits signes noirs, ont eu sur moi un effet puissant. Envie, besoin de les caresser, de tourner les pages, d'ouvrir, de fermer... Et il a fallu que j'apprenne à lire, très vite.. J'ai eu la chance de tomber sur une institutrice de maternelle qui a compris le problème et m'a donné des images avec les noms écrits dessous.. Je suis un pur produit de la méthode globale, et j'ai appris à lire toute seule, ou presque... Mon premier amour a donc été Balzac! Heureusement, ma mère a complété avec des livres pour enfants, mais je suis toujours retournée à Balzac! J'ai fini de lire la collection à huit ans!
Après, il a acheté Maupassant, Anatole France, Victor Hugo, Daudet, Tolstoï...Toujours en collections complètes, et les collections complètes du théâtre classique.. Et Shakespeare... La tête m'en tournait..

Tout celà pour dire que les livres, c'est toute ma vie, et que faire mal à un livre, ce m'est insupportable!
Comme je n'ai pas beaucoup de place et pas non plus beaucoup d'argent, je vais depuis des années à la bibliothèque pour tout ce qui est romans.
Et en ce moment, je lis un livre magnifique. Mais le problème, c'est qu'un de ceux qui ont lu le livre avant moi a cru que le livre lui appartenait, sans doute, et a souligné partout, écrit partout, corné les pages... Du coup, j'éprouve une vraie souffrance à lire, alors que le livre est excellent!

Comment peut on être goujat à ce point? Est ce qu'il s'imagine que ses petits crayonnages ridicules, pour souligner ce qu'IL PENSE vont rester pour les siècles des siècles? Quel massacre, quel manque de respect pour les autres, surtout que ce qu'il souligne ou ajoute voudrait tendre à faire croire qu'il est vibrant d'interêt pour la chose sociale!

En fait, non seulement il abîme le livre, mais il peut décourager des gens qui, comme moi, ne supportent pas qu'on dégrade un livre!